top of page

L'encolure - Aurélien Boitel, texte non libre de droit

L'encolure c'est mieux quand c'est joli, mais comme pour tout point de la conformation du cheval, ça n'est pas pour rien ! Dans cet article, nous allons partir de chaque phrase tirée du standard de l'AMHA la concernant pour détailler, point par point, et avec le plus de précision possible, à quoi doit ressembler une belle encolure. On parlera rapidement du standard de l'AMHR et de l'ASPC sur le sujet, mais c'est bien plus bref. Suivront quelques photos pour illustrer diverses qualités et défauts, ainsi que quelques postures, pour aider les néophytes et celles et ceux qui veulent approfondir leur coup d'œil sur le sujet à voir clairement ce qui est à rechercher sur une encolure, ou pas !

D'abord il faut expliquer que, d'une part, celle-ci sert de balancier à l’ensemble du corps du cheval, et que d'autre part étant reliée au reste du dos, et jusqu'aux postérieurs, via le ligament nuchal et le ligament supra-épineux avec le garrot comme point de liaison, elle est un élément à part entière de la locomotion du cheval. Sa conformation a donc des conséquences sur l’ensemble de la motricité du cheval. A mauvaise encolure, mauvais équilibre, éventuellement mauvaises allures et mauvaises capacités à l’effort, pour l’attelage ou l’obstacle par exemple. Précisons qu’il n'est pas pertinent de juger de la qualité d’une encolure lorsque le cheval “show”, tendu par et vers le handler, dans une attitude qui est tout sauf naturelle. Bien évidemment, le cheval n’aura jamais au naturel une encolure tenue de cette manière, surtout s'il est "entraîné" pour ça. Beaucoup d’encolures renversées semblent par exemple bien orientées lorsque le cheval est présenté, ce qui est trompeur, voire mensonger lorsque l'on dit de ce cheval, ne montrant que des photos où il est tendu, qu’il a une superbe encolure. C’est également le cas des photos de jeunes poulains attirés par leur handler par un balai, une peau de moufette ou un autre artifice pour attiser sa curiosité, et donc tout aussi trompeur. N’oubliez jamais que le cheval que vous aurez chez vous ne passera pas son temps avec quelqu’un au bout de la longe à essayer de cacher ses défauts. Cela fait de très belles photos, mais ce n'est pas une photo que vous aurez dans vos pâtures pendant plusieurs dizaines d'années. Cela étant dit, cet article ne se veut en aucun cas un pamphlet contre les shows a l'américaine, il faut juste garder en tête que lors de ceux-ci ce ne sont pas les qualités et les défauts des chevaux qui sont notés, mais la capacité de l'entraîneur à conditionner et présenter un cheval sous son meilleur jour possible.



 

Allons-y donc pour le standard de l'AMHA :

 

“The neck is set on the top of a well-angulated shoulder, departing well above the point of the shoulder and blending into the withers, giving the impression of the neck sitting on top of the withers rather than in front of them.”

​

L’encolure est implantée sur une épaule bien angulée, en partant au-dessus de la pointe de l’épaule et en couvrant bien le garrot, donnant l’impression que l’encolure est posée au sommet du garrot, plutôt que devant celui-ci.

 

    L’encolure doit donc être implantée relativement haut - ou du moins, pas trop bas ! Une encolure greffée bas (dont la base part au niveau de la pointe de l’épaule, voire en dessous) générera des problèmes d’équilibre (bout de devant alourdi, port de tête bas).

Ensuite, il est précisé que l’encolure ne doit pas former un “coup de hache” mais doit bien être dans le prolongement du garrot. Trop marqué, le coup de hache empêche le cheval de tendre correctement son encolure, ce qui le rend inapte au travail en plus d’être inesthétique. C’est un défaut qui est très fréquemment lié à une encolure renversée, ce qui est une petite astuce pour se rendre compte en regardant un cheval tendu pour le show de l’orientation réelle de son encolure.

​
 

→ “The slender neck is slightly arched forming a gentle curve from the poll to the back.”

  • L’encolure, fine, est légèrement arquée, formant une douce courbe de la nuque jusqu’au dos. 

 

    Donc, d'abord, l’encolure ne doit pas être épaisse, risquant d’alourdir là encore le bout de devant si le reste de la conformation du cheval n’est pas en adéquation. Ensuite, son bord supérieur doit être légèrement convexe, et ce sur sa totalité : les encolures en col de cygne sont à proscrire. Cela permet un port de tête haut mais nuit considérablement au travail. Un cheval avec une telle encolure aura beaucoup de mal à se tendre vers l'avant. Pour de l'obstacle, ou de l'attelage, c'est donc inexploitable.


 

→ “Its length is in proportion to body with the top line being considerably longer than the bottom line.”

  • Sa longueur est proportionnée au reste du corps, sa ligne du dessus est considérablement plus longue que sa ligne du dessous

 

    Sur la longueur : à cheval bréviligne, encolure courte ; à cheval longiligne, encolure longue. Le standard ne dit pas que l’encolure doit être longue mais qu’elle doit être en proportion avec le reste du cheval. Notez qu’une encolure plus courte que la tête, hormis le manque d’esthétique flagrant, sera une gêne pour la locomotion du cheval à vive allure (rappelons que l’encolure servant de balancier, à vive allure le balancier doit pouvoir être important). Si de plus elle est trop grêle (= pas assez musclée), le cheval portera au vent en permanence : devant contracter plus que de raison les muscles extenseurs de l’encolure pour porter ce poids trop important - splenius et angulaire de l’épaule - il sera contraint de se mouvoir la tête en l’air.

 

    Il est précisé que la ligne du dessus doit être bien plus longue que la ligne du dessous, et c’est donc là qu’on aborde la question de l’orientation de l’encolure. C’est un signe assez évident à remarquer de la correcte orientation de celle-ci : quelle que soit la posture du cheval (en particulier lorsqu’il pose sur une photo professionnelle ou en show, on y revient…) si vous observez que la ligne du dessus de l’encolure n’est guère plus longue, voire plus courte, que la ligne du dessous de celle-ci, vous savez sans doute possible que l’encolure est mal orientée.

Lorsque l’encolure est naturellement bien orientée, avec une conformation de la tête et du reste du corps sans gros défaut, le cheval n’aura pas besoin de particulièrement solliciter les muscles fléchisseurs de l’encolure (ceux du dessous de l’encolure). En revanche si elle est mal orientée, en raison d’un mauvais travail ou par exemple d’une conformation faite en descendant (pour faire court, garrot plus bas que la croupe), le cheval devant en permanence solliciter les muscles extenseurs devra développer en conséquence les muscles fléchisseurs, générant une “bosse” visible sous l’encolure, appelée traditionnellement “gorge de pigeon”. Notez que la meilleure façon d'observer l'orientation de l'encolure est encore de voir le cheval en mouvement : si au trot le cheval a la tête en l'air, c'est qu'elle est mal orientée.

​

​

    Le cheval lève trop la tête et pourtant ce sont les muscles fléchisseurs qui se développent ? Cela nécessite une explication ! Des muscles extenseurs hypotrophiés (dessus de l’encolure) et des muscles fléchisseurs hypertrophiés (dessous de l’encolure) alors que le cheval porte toujours haut, cela peut sembler contradictoire, et pourtant facilement explicable physiologiquement : une contraction forte et permanente d’un muscle ou d’un groupe de muscles ne les développe pas. Ce qui permet le développement d’un muscle, c’est la répétition du mouvement : contraction, puis relâchement progressif. Un bodybuilder connaît bien ce principe : c’est la répétition avec de la contrainte qui crée le volume musculaire. Les personnes qui ont le dos tout le temps tendu n’ont pas un dos de nageur. Ils ont juste des douleurs. En ce qui concerne l’encolure, le principe est le même : extenseurs de l’encolure crispés pour maintenir une posture (encore une fois, en raison de conformation douteuse ou de travail mal fait), et pour pouvoir fléchir un tant soit peu celle-ci lorsque c’est nécessaire, le cheval doit contracter fortement les fléchisseurs et ne peut pas les libérer aisément lorsqu’il reprend sa posture naturelle (ou contrainte par le travail du meneur). Mouvement concentrique en force, mouvement excentrique en force, cela répété dans le temps, ça augmente la production de fibres musculaires. Et donc, gorge de pigeon. Vous trouverez en photo en bas de cet article un exemple assez dramatique de ceci.

 

    Notez enfin sur ce point que le développement hormonal des mâles leur confère naturellement une encolure avec une convexité de la ligne du dessus. Ce qui vous permet de déduire, voyant un étalon adulte avec une encolure mal orientée, qu’il y a un réel problème soit dans sa conformation, soit dans le travail effectué avec celui-ci.


 

→ “The throatlatch is clean and well defined, allowing flexion at the poll and normal respiration.”

  • La gorge est nette et bien définie, permettant une flexion de la nuque et une respiration normale

 

    Alors là on aborde un problème très différent. L’attache de la nuque est naturellement plutôt épaisse chez la plupart des miniatures américains, héritage des ancêtres poney shetland, et le conditionnement pour le show permettant de camoufler ce problème (utilisation de neckwraps, voir photos), il semble que les éleveurs n’ont guère pris la peine de sélectionner leurs chevaux pour éviter de transmettre ce défaut. Pas besoin, puisqu'on peut tricher ! Notez que l’utilisation des neckwraps n’est malheureusement pas limitée à la gorge mais est utilisée sur l’ensemble de l’encolure lorsque celle-ci est trop épaisse au goût de l’entraîneur. Le fait est que le standard dit que la gorge du cheval doit être nette et bien définie, permettant flexion de la nuque et respiration normale. Et que conditionner artificiellement l'encolure des chevaux n'améliorera jamais leur patrimoine génétique.

    Cela est vraiment important, parce que dans certaines des disciplines d’attelage de show de l’AMHA et de l’AMHR/ASPC les chevaux sont engoncés dans des enrênements et avec des tensions très fortes des guides qui les contraignent à une position très fermée de la nuque. Pour un cheval aux parotides développées et avec une attache de nuque épaisse, cela n’engage que moi mais on est dans le domaine de la maltraitance, le cheval ne pouvant plus convenablement respirer. Vous trouverez dans les photos jointes des exemples frappants, pris entre autres lors des championnats du monde… Pour préserver l'anonymat des meneurs les photos sont rognées, je peux juste vous assurer que le grand sourire des meneurs sur chaque photo en dit long sur leur incompétence et leur inconscience.

    Cela étant dit, un cheval avec une gorge épaisse portera la nuque plus ouverte, ce qui n’a aucune conséquence sur le travail ou les allures, il faut juste savoir adapter la posture de son cheval à sa conformation. C’est surtout une considération esthétique, une gorge plus fine fait plus cheval que poney. 



 

    Pour l’AMHR, la seule précision concernant l’encolure dans le rule-book est la suivante : “Strong and muscular, proportionate to body and the type of horse represented.” Soit : forte et musclée, en proportion du reste du corps et du type de cheval représenté. Le reste est donc laissé à l’appréciation libre du juge.

 

    Pour l’ASPC Classic, on lit : “Must be proportionate to the body with extreme length of neck to be avoided. The neck should be well carried and moderately lean in the case of mares, without excessive crest; but inclined to be slightly crested in the case of mature stallions. A broken crest shall be faulted.” Soit : Doit être proportionnée au reste du corps sans excès de longueur. L’encolure doit être bien portée et modérément sèche pour les juments, sans excès de chignon, mais avec une convexité légère (“encline à un chignon léger”) pour les étalons adultes. Un chignon tombant doit être pénalisé.

 

    Pour l’ASPC Modern : “The neck should come out well above the point of the shoulder and should be of the length and thickness to compliment the rest of the pony. The mature stallion should have enough crest to denote masculinity.” Soit : l’encolure doit être bien sortie au-dessus de la pointe de l’épaule et doit être de la longueur et de l’épaisseur qui ira avec le reste du poney. L’étalon adulte doit avoir une convexité suffisante pour montrer de la masculinité.



 

​

De tout cela, on peut conclure qu'une belle encolure c'est une encolure qui va pouvoir bien fonctionner. Mais comme il n'est pas toujours facile de bien voir, au premier coup d'œil, si une encolure est bien ou pas, ça vaut la peine de prendre quelques instants pour apprécier musculature, implantation, ou longueur. 

Pour résumer : une longueur adéquate, une greffe correcte, des muscles développés plutôt près du garrot que de la trachée.

 

En n'oubliant pas qu'on ne pourra pas avoir une bonne encolure sur un ensemble de conformation mauvais.

Passons à quelques exemples illustrés

Encolure  - bien sortie : elle part du garrot, non devant le garrot

                 - bien greffée : elle sort du poitrail au-dessus de la pointe de l'épaule

              - bien orientée : on voit très nettement que la ligne de son dessous est plus courte que celle de son dessus, on note une convexité (un peu trop importante) et une musculature développée correctement pour l'usage varié qu'on pourrait faire d'un miniature américain : obstacle, dressage aux longues rênes, attelage, ...​

FB_IMG_1643180474408.jpg

Encolure  - mal sortie : elle part loin devant le garrot

         - mal orientée : ligne du dessous plus longue que celle de son dessus, renversée, gorge de pigeon​

​

Encolure dite "de cerf", elle rend le cheval inapte au travail sauf à faire preuve de beaucoup de patience et de compétences pour déconstruire puis reconstruire. S'agissant d'un cheval qui ne travaille pas, c'est une conformation naturelle qui doit questionner sur la pertinence de la mise à la reproduction.

pur-sang-arabe-092051.jpg

Encolure  "en col de cygne" chez un cheval arabe, ça permet une posture très haute de la tête, mais une inaptitude au travail : il est impossible au cheval d'utiliser à bon escient son encolure pour se tendre (tension du ligament nuchal et du ligament supra-épineux, ce genre de choses...) et donc impossibilité par exemple de tracter sans crisper le dos et se faire mal.

A comparer avec le standard de l'AMHA, ce n'est pas un type d'encolure qui convient pour la race.

FB_IMG_1637178202303.jpg
438-2__17725.jpg

Encolure courte mais bien proportionnée au reste du cheval, et adaptée à la race : pour de la traction avec des charges lourdes, sans nécessité d'allures amples ni de recherche de vitesse, une encolure courte et puissante est tout à fait adaptée. Notez qu'elle est très bien sortie et orientée. La tête bien que lourde n'est pas un handicap si la masse de muscles est suffisante pour la porter sans effort.

Exemple de "neck wraps" et autres "throatlatch sweats" utilisés pour "entraîner" un cheval pour les shows. Comprenez bien que 100% des chevaux présentés en show à l'américaine subissent cela. Ils sont portés 24h/24 pour être efficaces. Chacun estimera à quel point cela est acceptable ou non. Ces neckwraps, outre la question de l'éthique concernant le bien-être du cheval, posent deux problèmes majeurs : le premier est que vous ne pourrez jamais vous fier à une photographie d'un cheval préparé pour un show, la seconde est que, nous le répétons, c'est un objet de "tuning"​, ça n'améliorera jamais la génétique. Seule une bonne sélection des reproducteurs permet de contribuer à l'amélioration de la race.

Précisons que bien évidemment à l'élevage de Faren aucun cheval n'a porté ni ne portera ce genre d'outil pour modifier artificiellement l'apparence d'un cheval.

Exemple assez dramatique d'une encolure mauvaise, on peut imaginer sans difficulté que l'équitation pratiquée, contraignant le cheval à se mettre toujours derrière la main, a pu modifier l'encolure à ce point. Ce n'est pas qu'un problème esthétique, ce cheval ne peut pas tendre le ligament nuchal et par conséquent pas non plus le ligament supra-épineux, contraignant le cheval à se porter et à porter son cavalier avec des muscles normalement utilisés pour la locomotion (grands dorsaux), et générant de ce fait des cripsations continues et donc des douleurs. Vous le voyez, une mauvais encolure a de réelles conséquences sur votre cheval.

Ce n'est pas irréversible ! Mais ça nécessitera un travail long et fastidieux.

Deux encolures très correctes dans une très bonne attitude, chez un cheval de grande taille et chez un miniature. Cheval tendu vers l'avant, ramené sans excès.
Encolures bien orientées, allures très saines.​

Deux postures de travail très mauvaises, chevaux emboutis, allures défectueuses.

On voit nettement les trapèzes très crispés, créant une élévation très artificielle et défectueuse des antérieurs.
L'un comme l'autre sont engoncés dans des enrênements (overcheck et martingale) qui leur empêche la moindre liberté de mouvement dans l'encolure, aucune extension possible alors qu'ils en auraient très visiblement besoin.

Muscles brachio-céphaliques très contractés (regardez la partie inférieure de l'encolure) : le cheval se met derrière la main, et donc est dans l'incapacité de se tendre, et de tracter sans se faire mal.

Cheval fait en descendant, encolure creuse, mal orientée : conformation pas du tout adaptée à l'attelage.

Cheval dans un posture de show. Encolure qu'on pourrait trouver légèrement trop longue pour une utilisation pour le travail et greffée un peu haut, tout cela montre très clairement des origines ASPC. Ce n'est en rien gênant pour un travail léger, ça le serait uniquement pour une traction de charges lourdes.

Encolure pleine, légèrement arquée du garrot à la nuque, très bien sortie et orientée. Notez la ligne du dessus plus longue que celle du dessous, C'est le type de très belle encolure qui correspond tout à fait au standard de l'AMHA.

Il serait toutefois intéressant de voir le même cheval dans un attitude naturelle, et sans les artifices d'entraînement pour le show.

Miniatures lors d'un show : à première vue encolures très correctes, mais en y regardant de plus près on voit qu'elles sont creuses et que les muscles fléchisseurs de l'encolures sont bien plus développés que les muscles extenseurs, ce qui laisse supposer au naturel des encolures relativement mal orientées. Sur les deux premiers, on voit que l'encolure est mal sortie, plantée bien en avant du garrot. Il serait très intéressant de voir les mêmes chevaux dans une attitude non forcée, voire en mouvement, pour juger objectivement de leur orientation.

bottom of page